Actualités - Droit social



NOUVEAU PARAMETRAGE DE LA REDUCTION GENERALE DE COTISATIONS PATRONALES : LA DSS DEVOILE SON PROJET DE DECRET

01/11/2018

La réduction générale de cotisations patronales (ex-réduction Fillon) sera étendue aux contributions patronales de retraite complémentaire au 1er janvier 2019 et aux contributions d’assurance chômage au 1er octobre 2019, ainsi que le prévoit le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019. La direction de la sécurité sociale (DSS) a dévoilé le projet de décret en cours d’élaboration, qui laisse à voir le paramétrage envisagé. On rappellera que le texte doit sortir d’ici la fin décembre.

Extension à l’AGIRC-ARRCO et à l’assurance chômage

Deux temps. - La LFSS 2018 a prévu d’étendre la réduction générale de cotisations patronales (ex-réduction Fillon) aux contributions patronales d’assurance chômage (hors AGS) et aux contributions patronales des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoire (type AGIRC-ARRCO) (c. séc. soc. art. L. 241-13, I modifié ; loi 2017-1836 du 30 décembre 2017, art. 9-I, 2° et 9-V JO du 31).

On rappellera qu’il s’agit d’une réduction dégressive, maximale au niveau du SMIC et devenant nulle à 1,6 SMIC.

Cette extension, initialement prévue pour entrer en vigueur au 1er janvier, se fera finalement en deux temps :

- 1er janvier 2019 : extension aux contributions patronales AGIRC-ARRCO, qui représenteront pour le cas général, 6,01 points au niveau du SMIC (4,72 % de contribution AGIRC-ARRCO + 1,29 % de contribution d’équilibre général) ;

- 1er octobre 2019 : extension aux contributions patronales d’assurance chômage, soit 4,05 points au niveau du SMIC (en réalité, tout dépendra du niveau des cotisations qui sera fixé dans la prochaine convention d’assurance chômage).

Champ de la réduction en régime de croisière

Une fois le dispositif pleinement déployé, la réduction couvrira donc, au niveau du SMIC, les cotisations patronales d’assurance maladie et d’assurance vieillesse, la contribution solidarité autonomie, le FNAL, la cotisation AT (sauf fraction fixée par décret qui est hors champ de la réduction générale) ainsi que les contributions patronales de retraite complémentaire et d’assurance chômage.

Dans la formule de calcul de la réduction, la cotisation patronale d’assurance maladie sera prise en compte pour un taux diminué de 6 points. Sur les salaires inférieurs ou égaux à 2,5 SMIC sur l’année, les employeurs pourront en effet bénéficier d’une réduction de taux de 6 points sur la cotisation maladie à partir du 1er janvier 2019 (c. séc. soc. art. L. 241-2-1 nouveau au 1.01.2019 ; loi 2017-1836 du 30 décembre 2017, art. 9, JO du 31).

Coefficient maximal. – Le projet de décret prévoit que le coefficient maximal correspondant au périmètre complet de la réduction (périmètre actuel + AGIRC-ARRCO + assurance chômage) sera de 0,322 (employeur au FNAL à 0,10 %) ou de 0,326 (employeur au FNAL de 0,50 %).

Précisons que ces montants ne sont qu’indicatifs, puisque la valeur exacte dépendra de la fraction du taux de cotisation AT couverte par la réduction, laquelle peut évoluer fin 2018 par décret, comme ce fut le cas ces deux dernières années.

Des règles dérogatoires sont prévues pour 2019 (voir plus loin).

Paramètre T. – Le paramètre T à utiliser dans la formule de calcul du coefficient sera en principe égal à la valeur maximale du coefficient.

Il pourra être ajusté pour tenir compte des répartitions dérogatoires des contributions de retraite complémentaire AGIRC-ARRCO.

Si la règle de principe veut que ces contributions soient ventilées selon une clef de réparation « 60 % employeur / 40 % salarié », le régime unifié autorise les répartitions plus favorables aux salariés (accord national interprofessionnel du 17 novembre 2017 instituant le régime AGIRC-ARRCO, art. 38, al. 2). Dans ce cas, le paramètre T utilisé pour calculer le coefficient sera ajusté pour tenir compte de la part patronale résultant de la clef de répartition AGIRC-ARRCO propre à l’entreprise.

En revanche, le décret ne fait pas référence aux cas particuliers dans lesquels la part patronale de contribution AGIRC-ARRCO est fixée à un niveau supérieur au taux de droit commun (4,72 % en tranche 1). En creux, on peut en déduire que le paramètre T ne pourrait pas être ajusté à la hausse dans cette situation.

Ainsi, la valeur maximale du coefficient resterait plafonnée aux montants fixés par le décret (0,322 ou 0,326 en principe ; pour 2019 valeurs maximales dérogatoires indiquées plus loin).

Rémunération brute de référence. – Faute de précision contraire dans le PLFSS 2019 ou dans le décret, la rémunération brute prise en compte pour calculer le coefficient de la réduction ainsi que le montant de la réduction sera toujours le « brut sécurité sociale ».

Il en ira ainsi même dans les situations où les assiettes AGIRC-ARRCO, voire assurance chômage, sont différentes.

Imputation. – Le projet de décret prévoit une règle de ventilation du montant de la réduction.

La fraction de réduction correspondant aux cotisations patronales d’assurance maladie et d’assurance vieillesse, d’assurance chômage, au FNAL, à la contribution solidarité autonomie, à la fraction de taux AT couverte par la réduction Fillon et, à partir d’octobre 2019, aux contributions d’assurance chômage, sera imputée sur les cotisations et contributions déclarées aux URSSAF.

Elle sera déterminée par application d’un coefficient égal au rapport « taux de ces contributions / taux maximal du coefficient ».

Le solde de la réduction sera imputé sur les contributions déclarées aux organismes de retraite complémentaire.

Il sera sans doute nécessaire de ventiler ces deux éléments dans la DSN.

2019, une année particulière avec l’extension à l’assurance chômage en cours d’année

Calcul du coefficient selon le projet de décret. - Du fait de l’extension de la réduction aux cotisations chômage en cours d’année, il y aura en principe deux formules de calcul du coefficient de la réduction sur l’année 2019.

À s’en tenir à la lettre du projet de décret diffusé par la direction de la sécurité sociale, la situation serait traitée, sur le plan juridique, via deux coefficients :

- un coefficient « de base » couvrant la rémunération de toute l’année 2019, déterminé selon une formule de calcul correspondant au périmètre actuel de la réduction générale, élargi aux contributions patronales de retraite complémentaire : dans le cas général, le paramètre T serait de 0,2815 ou 0,2855 selon que l’employeur est soumis au FNAL de 0,10 % ou 0,50 % ;

- un coefficient complémentaire pour les rémunérations des périodes d’emploi allant du 1er octobre au 31 décembre 2019, pour tenir compte de l’élargissement aux cotisations chômage (le paramètre T serait de 0,0405 à s’en tenir au taux des contributions d’assurance chômage en vigueur à l’heure où nous rédigeons ces lignes).

Le paramètre de 0,2815 ou 0,2855 pourra être ajusté pour les employeurs ayant une répartition plus favorable au salarié à l’AGIRC-ARRCO (voir plus haut).

Valeurs maximales du coefficient. – Le coefficient maximal correspondant au périmètre de la réduction étendu à l’AGIRC-ARRCO serait donc de 0,2815 (FNAL de 0,10 %) ou 0,2855 (FNAL de 0,50 %).

Celui correspondant à la cotisation patronale d’assurance chômage serait de 0,0405.

À surveiller. - Rappelons que les paramètres de 0,2815 et 0,2855 ne sont donnés qu’à titre indicatif. La valeur exacte dépendra de la fraction du taux de cotisation AT couverte par la réduction, laquelle peut évoluer par un décret de fin 2018.

Quant au paramètre de 0,0405, il faudra aussi l’ajuster, si le taux de la contribution patronale d’assurance chômage évolue dans la prochaine convention d’assurance chômage.

Effets d’aubaine ? – L’intégration des cotisations chômage dans le champ de la réduction à partir d’octobre 2019 pourrait laisser place à certaines tentations d’optimisation, toutefois peu facile à manier compte tenu de la dégressivité de la réduction.

Il serait logique que l’administration apporte par circulaire des précisions spécifiques visant à neutraliser les effets de bord, comme elle l’avait fait en 2016 pour la réduction de cotisations d’allocations familiales.

Réduction appliquée en remplacement des exonérations spécifiques supprimées au 1er janvier 2019

PLFSS 2019 (rappel). - L’avant-projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019 prévoit de supprimer un certain nombre d’exonérations ciblées de cotisations patronales au 1er janvier 2019 :

- contrat d’apprentissage (hors secteur public) ;

- contrats de professionnalisation conclus avec des demandeurs d’emploi de 45 ans et plus ou par des groupements d’employeurs ;

- associations intermédiaires ;

- contrat d’accompagnement dans l’emploi (sauf collectivités territoriales et personnes morales de droit public) ;

- ateliers et chantiers d’insertion (sauf employeurs publics).

Réduction étendue aux cotisations chômage dès le 1er janvier 2019. - À la place des exonérations spécifiques abrogées, les employeurs pourront bénéficier des allégements généraux de cotisations.

En l’état, l’avant-projet de loi prévoit que, par dérogation, pour ces contrats, la réduction générale de cotisations s’étendrait à l’assurance chômage dès le 1er janvier 2019. Elle serait donc appliquée en périmètre complet dès cette date, par dérogation au calendrier d’extension en deux temps prévu pour 2019 (voir plus haut).

Déductions forfaitaires spécifiques pour frais professionnels

La LFSS 2018 a introduit, à partir de 2019, un changement technique au niveau du calcul du coefficient, qui concernera les employeurs de salariés ouvrant droit à une déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels (DFS) pour l’assiette des cotisations (certains ouvriers du BTP, VRP, journalistes, etc.).

La rémunération prise en compte dans la formule de calcul du coefficient des intéressés ne tiendra compte des DFS que dans les limites et conditions fixées par arrêté ministériel (c. séc. soc. art. L. 241-13, III modifié au 1.01.2019 ; loi 2017-1836 du 30 décembre 2017, art. 9-I, 2° et 9-V JO du 31).

Cet arrêté doit également paraître d’ici la fin d’année, si les pouvoirs publics entendent appliquer cette mesure à la date prévue.

On rappellera que l’étude d’impact du PLFSS 2018 proposait de calculer le coefficient de la réduction générale sur une rémunération prenant en compte un taux de DFS réduit d’un tiers environ par rapport au taux actuellement applicable. En pratique, tout dépendra des textes d’application qui mettront cette réforme en musique. Cette mesure vise à éviter ce que les pouvoirs publics considèrent comme un « effet d’aubaine ». Il est vrai que le cumul de la DFS avec la réduction permet en pratique aux employeurs de bénéficier, sur les rémunérations des salariés concernés, d’un niveau d’allégement plus important que celui qui aurait normalement été applicable au regard du salaire réel.

Formules de calcul prévisionnelles du coefficient selon le projet de décret (cas général)

Ainsi que le souligne le projet de décret, les valeurs du paramètre T de 0,2815, de 0,2855, de 0,322 et de 0,326 ne sont données qu’à titre indicatif. La valeur exacte dépend également de la fraction du taux de cotisation AT couverte par la réduction, laquelle peut évoluer en fin d’année par décret, comme ce fut le cas ces deux dernières années.

 

 

 

Réduction année 2019

Ensemble de l’année (périmètre actuel + AGIRC-ARRCO)

• Employeur au FNAL de 0,10 % : C = (0,2815/0,6) × [(1,6 × SMIC annuel/Rémunération annuelle brute) – 1]

• Employeur au FNAL de 0,50 % : C = (0,2855/0,6) × [(1,6 × SMIC annuel/Rémunération annuelle brute) – 1]

• Coefficient maximal : 0,2815 ou 0,2855 pour le cas général

Coefficient complémentaire pour les rémunérations octobre/décembre 2019 (assurance chômage)

• C = (0,0405/0,6) × [(1,6 × SMIC/Rémunération brute) – 1] (a)

• Coefficient maximal : 0,0405

 

 

Réduction à périmètre complet, soit régime actuel + AGIRC-ARRCO + ass. chômage (b)

• Employeur au FNAL de 0,10 % : C = (0,322/0,6) × [(1,6 × SMIC annuel/Rémunération annuelle brute) – 1]

• Employeur au FNAL de 0,50 % : C = (0,326/0,6) × [(1,6 × SMIC annuel/Rémunération annuelle brute) – 1]

• Coefficient maximal : 0,322 ou 0,326 pour le cas général

(a) Le paramètre de « 0,0405 » dépendra bien entendu du taux des cotisations patronales d’assurance chômage applicable. On pourrait imaginer ici que le SMIC et la rémunération brute soient retenus pour l’année, le coefficient complémentaire ainsi dégagé n’étant appliqué qu’aux rémunérations des périodes d’emploi d’octobre à décembre 2019.

(b) 2020 dans le cas général. Dès le 1er janvier 2019 pour les contrats dont les exonérations spécifiques devraient être supprimées par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (voir nos développements).


Projet de décret diffusé par la direction de la sécurité sociale le 4 octobre 2018


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