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La réintégration d'un salarié protégé sur un autre poste que le sien, suite à un avis du médecin du travail, peut-elle justifier une prise d'acte ?

01/08/2018

Un salarié dont l’inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement doit être réintégré dans son poste. Pour autant, le fait que l’employeur réaffecte le salarié à un autre poste pour tenir compte de l’avis d’inaptitude donné par le médecin du travail, ne signifie pas qu’il ne remplit pas son obligation de réintégration et que ce manquement peut justifier une prise d’acte de la part du salarié.

L’affaire. - À l’issue d’un congé maladie, un salarié (ouvrier de scierie) avait passé une visite de reprise donnant lieu à un avis d’inaptitude. Suite à ses congés payés, du 17 avril au 5 juin 2012, il ne s’était pas présenté sur son lieu de travail, le 7 juin 2012. Le salarié n’avait réclamé ni la lettre recommandée du 24 avril 2012 dans laquelle la société lui proposait de l’affecter au poste de manœuvre scierie à l’issue de son arrêt de travail, sans changement de rémunération brute horaire, ni celle du 21 mai 2012 lui rappelant qu’il devait reprendre son travail le 7 juin 2012.

L’employeur l’avait convoqué à un entretien préalable à un licenciement (le 22 juin 2012) et, s’agissant d’un salarié délégué du personnel suppléant, avait demandé à l’inspecteur du travail une autorisation de licenciement que celui-ci avait refusé le 26 octobre 2012.

Le 21 mars 2013, le salarié avait saisi le conseil de prud’hommes afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail et, dans l’attente de cette décision, le 30 avril 2015, il avait pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur. Il reprochait à son employeur de ne pas avoir respecté son obligation de le réintégrer sur son poste suite au refus de l’autorisation de licenciement par l’inspecteur du travail et à la déclaration d’inaptitude, une modification unilatérale du contrat de travail, un non-paiement des salaires et une violation de l’obligation de sécurité.

Cette prise d’acte mettait fin à la demande de résiliation judiciaire, et les juges avaient décidé qu’elle n’était pas justifiée et qu’elle produisait les effets d’une démission, ce que le salarié contestait.

Prise d’acte par un salarié protégé. - Un salarié en contrat à durée indéterminée peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur. Cette rupture est justifiée lorsque les faits fautifs ou les inexécutions des obligations contractuelles ou conventionnelles de l’employeur sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite de la relation contractuelle (cass. soc. 30 mars 2010, n° 08-44236, BC V n° 80).

Lorsqu’il s’agit d’un représentant du personnel, les manquements de l’employeur peuvent concerner soit le contrat de travail soit le mandat du salarié. La prise d’acte d’un salarié représentant du personnel produit les effets d’un licenciement nul, lorsque les faits la justifient, et ceux d’une démission, dans le cas contraire.

La solution d’espèce. - Dans l’affaire jugée le 5 juillet 2018, les juges relèvent que, le 24 avril 2012, après avis du médecin du travail, l’employeur a proposé au salarié de l’affecter sur le poste de manœuvre scierie sans perte de rémunération mais que, à compter du 7 juin 2012 et postérieurement au refus de l’autorisation de licenciement par l’inspecteur du travail du 26 octobre 2012, le salarié ne s’est pas présenté sur son lieu de travail.

Pour rappel, la Cour de cassation a déjà jugé que le défaut de réintégration d’un salarié protégé justifie qu’il prenne acte de la rupture de son contrat de travail (cass. soc. 12 avril 2012, n° 10-28697 D).

Mais en l’espèce, pour les juges, les manquements de l’employeur n’étaient pas suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et analyser la prise d’acte de la rupture du contrat de travail comme une démission.

cass. soc. 5 juillet 2018, n° 16-23605 D


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